Les scientifiques découvrent que les réponses du cerveau à la structure des phrases diffèrent selon qu'il s'agit de parler ou d'écouter.
Comment le cerveau réagit-il à la structure des phrases lorsque nous parlons et écoutons ? Dans une étude de neuroimagerie publiée dans PNASdes chercheurs de l'Institut Max Planck de psycholinguistique (MPI) et de l'Université Radboud de Nimègue ont étudié pour la première fois le traitement des phrases lors de la parole spontanée.
Pendant que nous parlons, l’activité cérébrale augmente dès le début des phrases, anticipant la construction d’une structure. En revanche, lors de l’écoute, l’activité cérébrale augmentait à la fin des phrases, reflétant l’intégration de la structure des phrases.
Parler et écouter impliquent de combiner des mots dans une phrase en suivant des règles grammaticales. Cependant, le moment précis de ce « traitement syntaxique » reste flou. La production de phrases est moins souvent étudiée que la compréhension de phrases. De plus, les chercheurs étudient généralement la production de phrases avec des tâches complexes très différentes de la parole dans des situations naturelles.
« Le traitement syntaxique nous permet de combiner des mots pour créer de nouvelles significations », explique le chercheur principal Peter Hagoort, directeur de l'Institut Donders pour le cerveau, la cognition et le comportement. « Nous avons étudié les réponses cérébrales à la parole spontanée, afin de mieux comprendre comment le cerveau le fait et comment ce processus diffère lorsque nous parlons et lorsque nous écoutons. »
Regarder la télévision dans un scanner
Les chercheurs ont décidé de comparer les réponses cérébrales au traitement syntaxique lors de la parole et de l'écoute spontanées. Des anglophones natifs ont regardé un épisode de la série de la BBC « Sherlock » dans un scanner IRM. Ensuite, il leur a été demandé de rappeler ce qui s’était passé avec leurs propres mots. D'autres participants ont ensuite écouté l'un des participants parler de l'épisode (« Alors, ils ont commencé avec une séquence de rêve de fusillade »). Cela a permis à l’équipe de comparer l’activité cérébrale en parlant et en écoutant les mêmes phrases.
L'équipe a extrait la structure syntaxique de chaque phrase prononcée et a modélisé le nombre d'opérations syntaxiques à effectuer sur chaque mot pour construire la structure de la phrase. Ils ont ensuite demandé quelles zones du cerveau étaient sensibles à ces opérations syntaxiques lors de la parole et de l’écoute.
Activation anticipée ou tardive
Pendant la parole, les zones cérébrales associées au traitement syntaxique ont montré une activation accrue au début des phrases. Cela indique que pendant que nous parlons, nous construisons la structure des phrases progressivement ou mot par mot, en prévision de ce qui va suivre. En revanche, pendant l’écoute, l’activité cérébrale a augmenté vers la fin des phrases, des groupes de mots qui fonctionnent comme des unités grammaticales. Pour comprendre une phrase, les participants à cette étude étaient plus susceptibles d'adopter une approche « attentiste », pour réussir à intégrer toutes les informations disponibles dans une structure.
« Cette étude nous rapproche de la compréhension des similitudes et des différences entre parler et écouter et de la manière dont ces fonctions quotidiennes sont mises en œuvre dans le cerveau », explique la première auteure, Laura Giglio.
« Il est possible d'étudier la parole spontanée et on peut en apprendre beaucoup. Les recherches futures pourraient tirer parti de cette étude pour mieux modéliser les réponses cérébrales au traitement linguistique et mieux décrire la relation complexe entre parler et écouter. »